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Des collisions d’ions au LHC à une nouvelle énergie record

Genève, le 25 novembre 2015. Après un redémarrage réussi et de premiers mois de prise de données sur les collisions de protons à une nouvelle énergie record, le Grand collisionneur de hadrons (LHC) entre dans une nouvelle phase avec les premières collisions d'ions plomb de la « saison 2 », à une énergie presque deux fois plus élevée que le maximum jamais atteint dans un collisionneur. Après une période d’intense activité consacrée à la reconfiguration du LHC et de sa chaîne d’accélérateurs pour les faisceaux d’ions lourds, les spécialistes des accélérateurs du CERN1 ont mis les faisceaux en collision pour la première fois en début de matinée le 17 novembre 2015, et les faisceaux ont été déclarés « stables » aujourd’hui à 10h59. Cela ouvre la voie à un mois d’exploitation avec des ions plomb, des particules de charge positive constituées d’atomes de plomb débarrassés de leurs électrons. Les quatre grandes expériences LHC collecteront toutes des données, y compris LHCb, qui enregistrera pour la première fois des collisions de ce type. Avec les collisions d’ions plomb, les expériences LHC vont pouvoir étudier un état de la matière qui a existé juste après le Big Bang, à une température atteignant plusieurs milliers de milliards de degrés.

« Chaque année, nous réalisons des collisions d’ions pendant un mois dans le cadre de notre programme de recherche diversifié, a déclaré le Directeur général du CERN, Rolf Heuer. Cette année est toutefois particulière car nous atteignons des énergies inédites et allons étudier la matière à un stade encore plus précoce de notre Univers. »

À la naissance de l’Univers, pendant quelques millionièmes de seconde, la matière a existé sous la forme d’un milieu extrêmement chaud et dense - une sorte de « soupe » primordiale de particules, composée principalement de particules fondamentales de matière que l’on appelle les quarks et les gluons. Aujourd’hui, dans un Univers froid, les gluons maintiennent ensemble les quarks pour former les protons et les neutrons, lesquels constituent la majeure partie de la matière, dont les êtres vivants, ainsi que d’autres types de particules.

« Il y a de très nombreuses questions aussi brûlantes que complexes qui pourront être explorées grâce à l’exploitation avec ions, pour laquelle notre expérience a été spécialement conçue, puis améliorée pendant l'arrêt, a indiqué Paolo Giubellino, porte-parole de la collaboration ALICE.  Ainsi, nous avons hâte de voir les effets de l’augmentation d’énergie sur la production de charmoniums, et d’étudier les saveurs lourdes et l’atténuation des jets avec un plus grand nombre de données. Toute la collaboration se prépare avec enthousiasme à explorer de nouveaux horizons. »

 

Collisions d'ions plomb dans le détecteur d'ALICE. (Image: ALICE ©CERN)

En augmentant l’énergie des collisions, on augmentera le volume et la température du plasma de quarks et de gluons, ce qui permettra de mieux comprendre le milieu en interaction forte créé lors des collisions d’ions plomb au LHC.  Par exemple, lors de la « saison 1 », les expériences LHC ont confirmé la nature parfaitement liquide du plasma de quarks et de gluons et l’existence d’un phénomène d’« atténuation des jets » dans les collisions d’ions, qui fait que les particules créées perdent de l’énergie dans le plasma de quarks et de gluons. Ce phénomène très abondant sera pour les expériences un outil permettant de caractériser le comportement du plasma de quarks et de gluons. Les mesures sur les jets à plus haute énergie permettront une nouvelle caractérisation, plus détaillée, de ce très intéressant état de la matière.

« Les données sur les collisions d’ions lourds compléteront celles prises cette année sur les collisions proton-proton, a indiqué Dave Charlton, porte-parole de la collaboration ATLAS. Nous nous réjouissons de pouvoir élargir les études d’ATLAS sur le comportement d’objets énergétiques comme les jets et les bosons W et Z dans le plasma de quarks et de gluons. »  

 

Collisions d'ions plomb dans le détecteur d'ATLAS (Image: ATLAS ©CERN)

Les détecteurs LHC ont été notablement améliorés pendant le premier long arrêt du LHC. Avec des données plus nombreuses, les physiciens espèrent pouvoir étudier plus en détail les signaux prometteurs observés pendant la « saison 1 ».

« Les saveurs lourdes seront produites en grand nombre pendant la « saison 2 », offrant de nouvelles possibilités d’étudier la matière hadronique dans des conditions extrêmes, a déclaré Tiziano Camporesi, porte-parole de la collaboration CMS. CMS est une expérience idéale pour détecter ces objets rares et les mesurer avec une grande précision. »

 

Collisions d'ions plomb dans le détecteur de CMS (Image: CMS ©CERN)

La collaboration LHCb va rejoindre pour la première fois le club des expériences collectant des données sur les collisions ion-ion.

« C’est un saut dans l'inconnu pour LHCb, dont le détecteur est capable d'identifier des particules de manière très précise. Les mesures réalisées sont très complémentaires par rapport à celles de nos collègues des autres expériences LHC », a souligné Guy Wilkinson, porte-parole de la collaboration LHCb.

 

Collisions d'ions plomb dans le détecteur de LHCb (Image: LHCb ©CERN)

 

1. Le CERN, Organisation européenne pour la Recherche nucléaire, est le plus éminent laboratoire de recherche en physique des particules du monde. Il a son siège à Genève. Ses États membres actuels sont les suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Israël, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Royaume-Uni, Slovaquie, Suède et Suisse. La Roumanie a le statut de candidat à l’adhésion. La Serbie est État membre associé en phase préalable à l’adhésion. Le Pakistan et la Turquie sont États membres associés. Les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, l’Inde, le Japon, l’Institut unifié de recherche nucléaire (JINR), l’UNESCO et l’Union européenne ont le statut d'observateur.