View in

English

L’expérience neutrino ICARUS partira pour le Fermilab

Genève, le 22 avril 2015. Un groupe de scientifiques, avec à sa tête le prix Nobel Carlo Rubbia, traversera l’océan Atlantique en compagnie du détecteur de neutrinos à argon liquide le plus grand du monde. Celui-ci quittera le CERN1 pour rejoindre son nouveau port d’attache, le Laboratoire national de l'accélérateur Fermi2 du ministère de l’Énergie des États-Unis3.

De 2010 à 2014, ce détecteur de 760 tonnes et 20 mètres de longueur a enregistré des données pour l’expérience ICARUS menée au Laboratoire national du Gran Sasso de l’Institut de physique nucléaire INFN4, en Italie, exploitant un faisceau de neutrinos envoyé par le CERN à travers l’écorce terrestre. Le détecteur est actuellement en cours de rénovation au CERN, où il a inauguré une nouvelle installation d’essai pour les détecteurs de neutrinos.

Une fois au Fermilab, le détecteur intégrera un ensemble de trois expériences consacrées à l’étude des neutrinos, des particules insaisissables très présentes autour de nous, mais qui restent encore mystérieuses.

Les trois détecteurs seront remplis d’argon liquide et utiliseront une technologie novatrice de projection temporelle dans laquelle les particules chargées créées dans les interactions neutrinos sont attirées vers des plans de fils fins qui vont enregistrer une image 3D des traces laissées par ces particules. Chaque détecteur apportera des résultats différents mais complémentaires dans la quête d’un quatrième type de neutrino.

« La chambre à projection temporelle à argon liquide est une nouvelle technique très prometteuse, mise au point à l’origine au sein de la collaboration ICARUS pour une expérience de petite dimension avant d’être adaptée pour un grand détecteur de neutrinos, a déclaré Carlo Rubbia. Elle devrait devenir la technologie de référence pour les grands détecteurs à argon liquide grâce à ses capacités d'enregistrer des traces de particules ionisantes au millimètre près. »

Le Fermilab exploite deux puissants faisceaux de neutrinos et est en train d’en mettre au point un troisième. C’est l’endroit idéal pour que le détecteur ICARUS poursuive son exploration scientifique. Les scientifiques prévoient d’emmener le détecteur aux États-Unis en 2017.

La série de trois détecteurs à argon liquide prévue apportera de nouveaux éléments sur les trois types de neutrino connus et recherchera un quatrième type encore jamais observé en s’appuyant sur les indices apportés par d'autres expériences au cours des deux dernières décennies.

De nombreuses théories de la physique des particules prédisent l’existence d’un neutrino dit « stérile », qui se comporterait de manière différente des autres types de neutrino connus et qui, s’il existe, pourrait permettre de faire avancer notre compréhension de la mystérieuse matière noire qui constitue 25 pour cent de l'Univers. La découverte de ce quatrième type de neutrino révolutionnerait la physique en modifiant la manière dont les scientifiques représentent l’Univers et son fonctionnement.

« L’arrivée d’ICARUS et la conception au Fermilab de ce programme de recherche est en soi un objectif ambitieux, a déclaré le Directeur du Fermilab Nigel Lockyer. C'est également un premier pas vers la mise en place au Fermilab d'une installation neutrino véritablement internationale, avec l’aide de nos partenaires du monde entier. La recherche sur les neutrinos aux États-Unis est promise à un avenir brillant. »

L’ensemble d’expériences proposées par le Fermilab comprend également un nouveau détecteur de neutrinos courte distance de 260 tonnes (Short Baseline Neutrino Detector – SBND), qui sera installé au plus près de la source du faisceau de particules. Ce détecteur est en train d’être construit par une équipe de scientifiques et d’ingénieurs issus d’universités et de laboratoires nationaux des États-Unis et d’Europe.

Le faisceau de neutrinos traversera ensuite le détecteur MicroBooNE de 170 tonnes, déjà achevé, qui sera mis en service l’année prochaine. Le détecteur ICARUS sera le dernier maillon de la chaîne. Il sera abrité dans un nouveau bâtiment qui doit être construit sur le site.

La construction des bâtiments qui abriteront les détecteurs ICARUS et SBND devrait commencer plus tard dans l’année, et les trois expériences devraient être opérationnelles en 2018. Les trois collaborations regroupent des scientifiques provenant de 45 instituts de six pays.

Le déménagement du détecteur ICARUS est un exemple remarquable de coopération entre des pays (et entre trois collaborations scientifiques) en vue de la réalisation d’un objectif de physique commun. L’actuelle stratégie européenne pour la physique des particules, adoptée par le Conseil du CERN, recommande que l’Europe participe activement aux expériences neutrino menées ailleurs dans le monde plutôt que de réaliser de telles expériences au CERN.

La communauté de la physique des particules des États-Unis a adopté le programme P5 (Particle Physics Project Prioritization Panel), qui appelle à la création au Fermilab d’une installation neutrino longue distance de classe mondiale exploitée par une collaboration internationale. Le Fermilab, le CERN et l’INFN ainsi que de nombreux autres instituts internationaux devraient participer à cette entreprise.

Les connaissances acquises grâce à la série de trois expériences à argon liquide seront importantes pour la mise au point de l’expérience DUNE auprès de l’installation longue distance prévue au Fermilab. DUNE sera la plus grande expérience sur les oscillations de neutrinos jamais construite. Elle enverra des particules vers un détecteur à argon liquide de 40 000 tonnes situé à quelque 1 300 km du Fermilab, au Sanford Underground Research Lab, dans le Dakota du Sud.

« Le transport d’ICARUS d’Italie au CERN, puis aux États-Unis est un bel exemple de planification à l’échelle mondiale en physique des particules, a déclaré le Directeur général du CERN Rolf Heuer. La participation des États-Unis au LHC et la participation de l’Europe au programme neutrino du Fermilab font partie intégrante de la stratégie européenne et de celle des États-Unis. Je suis heureux que le CERN, avec le transport d’ICARUS, ait pu apporter sa pierre à l’édifice et permettre la réalisation de DUNE. »

« ICARUS T600 est le seul détecteur au monde de plus de 600 tonnes d’argon liquide à avoir été exploité avec succès, a souligné le Vice-président de l’INFN Antonio Masiero. Il utilise une technique novatrice ultra-précise pour détecter des neutrinos produits de manière artificielle dans un accélérateur. Cette technique, mise au point à l’INFN et utilisée avec succès pour la première fois avec l’expérience ICARUS au Laboratoire national du Gran Sasso de l’INFN, sera une contribution fondamentale à la recherche sur les neutrinos dans la nouvelle installation prévue au Fermilab. »

 

Contacts médias :

1. Le CERN, Organisation européenne pour la Recherche nucléaire, est le plus éminent laboratoire de recherche en physique des particules du monde. Il a son siège à Genève. Ses États membres actuels sont les suivants : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Israël, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Royaume-Uni, Slovaquie, Suède et Suisse. La Roumanie a le statut de candidat à l’adhésion. La Serbie est État membre associé en phase préalable à l’adhésion. Les États-Unis d’Amérique, la Fédération de Russie, l’Inde, le Japon, la Turquie, l’Institut unifié de recherche nucléaire (JINR), l’UNESCO et l’Union européenne ont le statut d'observateur.
2. Le Fermilab est le plus grand laboratoire national des États-Unis pour la recherche en physique des particules et la recherche s’appuyant sur des accélérateurs. Relevant du Bureau des sciences du ministère de l’Énergie des États-Unis (DOE), le Fermilab est situé près de Chicago, dans l’Illinois, et géré par la Fermi Research Alliance, LLC. Visitez le site web du Fermilab : www.fnal.gov. Suivez le Fermilab sur Twitter : @Fermilab.
3. Le Bureau des sciences du ministère de l’Énergie des États-Unis (DOE) soutient la recherche fondamentale en sciences physiques aux États-Unis et s’attache à résoudre des problèmes cruciaux de notre temps. Pour plus d'informations, consultez le site science.energy.gov.
4. L’Institut national de physique nucléaire (INFN) gère et soutient la recherche théorique et expérimentale dans les domaines de la physique subnucléaire, de la physique nucléaire et de l’astrophysique des particules en Italie, sous la supervision du ministère de l’Éducation, de l’Université et de la Recherche (MIUR). Les activités de recherche de l’INFN se déroulent dans quatre laboratoires nationaux à Catane, à Frascati, à Leganro et au Gran Sasso, et dans 20 divisions basées dans des départements universitaires de physique dans différentes villes d’Italie. Visitez le site web de l’INFN : www.infn.it. Suivez l’INFN sur Twitter : @UffComINFN.