Genève, le 6 novembre 1995. L'énergie du LEP, le grand collisionneur électron-positon du CERN1, est montée d'un cran. Le 31 octobre, des collisions de particules ont été observées pour la première fois à 130 GeV, l'énergie la plus élevée jamais atteinte dans un collisionneur électro n-positon. Après six années consacrées à l'étude des particules élémentaires appelées Z, le LEP a été porté sans à-coups à sa nouvelle énergie qui offre la possibilité de découvrir de nouvelles particules et d'approfondir notre connaissance de la marche d e l'Univers.
Le LEP a été conçu pour l'étude de la force nucléaire faible qui alimente le Soleil et à laquelle on doit certaines formes de radioactivité naturelle. La force faible est portée par des particules appelées W+, W- et Z. Dans un premier temps, le LEP a pro duit des collisions d'une énergie juste suffisante pour produire le Z qui "pèse" très légèrement plus de 90 GeV (environ 10-22 (à la puissance moins 22) gramme). Lors de sa deuxième étape qui doit commencer au cours du second semestre de l'an prochain, l e LEP fonctionnera presque au double de cette énergie, qui suffira pour produire les particules W+ et W- par paires et achever les études de la force faible.
L'ère des Z au LEP a pris fin dans la dernière semaine de septembre. L'étape suivante du programme de relèvement de l'énergie du LEP a débuté aussitôt avec l'installation de 16 nouvelles cavités accélératrices supraconductrices venant s'ajouter aux 44 déj à en place. Grâce à ces 60 cavités supraconductrices, le système d'accélération du LEP fournit une tension totale de 800 millions de volts, ce qui en fait déjà l'accélérateur de particules supraconducteur le plus puissant jamais construit. Le LEP a redéma rré le 28 octobre et, trois jours plus tard, les physiciens attendaient dans l'enthousiasme de nouveaux faisceaux d'énergie plus élevée. Cette attente ne fut pas déçue, le LEP produisant des collisions au premier essai.
Evénements sont disponible de ALEPH, DELPHI, L3 et OPAL.
La rapidité avec laquelle l'accélérateur a été perfectionné et remis en marche est sans précédent et constitue un exploit remarquable à mettre au crédit de l'équipe du LEP. Le record d'énergie du LEP a été battu plusieurs fois en cours de route. L'énergie des faisceaux a atteint 69,875 GeV durant les essais, puis des collisions ont été provoquées entre les deux faisceaux de 65 GeV chacun. La performance de la machine rivalise déjà avec celle enregistrée à des énergies plus faibles et un réglage minutieux l'améliorera encore dans les semaines à venir. L'objectif visé est une énergie de collision de 140 GeV avant la période d'arrêt hivernale annuelle.
Chaque relèvement de l'énergie ouvre la perspective de découvertes et les physiciens du CERN attendent avec impatience les résultats de la période d'expérimentation à 130-140 GeV. Une théorie prédit que de nouvelles particules, dites supersymétriques, pou rraient exister à des énergies supérieures à celles qui ont été atteintes à ce jour. Selon la théorie de la supersymétrie, chaque particule connue a son pendant supersymétrique, ce qui permet de répondre à bien des questions que laisse ouvertes le "modèl e standard" la théorie actuelle. Si la supersymétrie est juste, une des particules supersymétriques les plus légères, le chargino, pourrait être à la portée du LEP et les physiciens du CERN sont à l'affût d'indices révélateurs.
1. Le CERN, Laboratoire européen pour la physique des particules, a son siège à Genève. Ses Etats membres sont les suivants: Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, l a République slovaque, la République tchèque, Royaume-Uni, Suède et Suisse. La Fédération de Russie, Israël, le Japon, la Turquie, la Yougoslavie (le statut d'observateur est suspendu après l'embargo de l'ONU, juin 1992), la Commission des Communautés européennes et l'UNESCO ont le statut d'observateur.