Genève, le 13 décembre 2002. Le Conseil du CERN1, au sein duquel les représentants des vingt Etats membres de l'Organisation décident des programmes scientifiques et des ressources financières, a tenu ce jour sa 123e session sous la présidence du professeur Maurice Bourquin. L'élection du prochain Directeur général, le plan de base pour 2003-2010 et un nouveau statut pour les Etats non européens figuraient parmi les points qui ont fait l'objet d'une décision positive.
M. Robert Aymar nommé futur Directeur général
M. Robert Aymar , Directeur du Réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER), a été nommé pour succéder au professeur Luciano Maiani en qualité de Directeur général du CERN à compter du 1er janvier 2004. M. Aymar, nommé pour cinq ans, présidera à la mise en service de la machine qui constitue le projet majeur actuel du CERN, le Grand collisionneur de hadrons (LHC), en 2007. Il travaillait auparavant au Commissariat français à l'énergie atomique (CEA). Il a également dirigé le programme Tore Supra - l'un des plus grands tokamaks au monde, basé sur l'utilisation d'aimants toroïdaux supraconducteurs - depuis sa conception en 1977 jusqu'à son exploitation en 1988. Il connaît bien les défis que doit relever le projet LHC, puisqu'il a dirigé le Comité d'examen externe créé en décembre 2001 pour trouver une solution à l'accroissement du coût du LHC à la date de son achèvement. Commentant sa nomination, M. Aymar a déclaré : "Je suis très honoré par cette décision et je remercie les membres du Conseil pour la confiance qu'ils ont placée en moi. Le CERN est une institution prestigieuse : Je suivrai les bons exemples de mes prédécesseurs et avec l'aide du personnel du CERN, des membres des collaborations et de ceux qui soutiennent cette institution, j'espère pouvoir offrir à celle-ci l'avenir brillant et tout le succès qu'elle mérite."
Un Plan de base pour assurer l'avenir du LHC
Le Conseil a assuré l'avenir du projet LHC en approuvant à l'unanimité le Plan de base pour 2003-2010. La Direction du CERN a présenté une proposition de révision du cadre financier défini en 1996 pour le LHC, avec comme priorité absolue l'achèvement du LHC en 2007. Ce nouveau Plan de base confirme l'objectif d'une mise en service du LHC en avril 2007. La majorité des ressources du CERN seront engagées sur le projet, ce qui ne laissera subsister qu'un programme hors LHC très limité. Dans le Plan, des budgets globaux jusqu'à l'achèvement, comprenant les dépenses de matériel et de personnel, ainsi qu'une provision pour imprévus, sont affectés à la construction du LHC et la participation du CERN à la construction des détecteurs. L'une des bases du Plan est un examen complet, effectué en 2002, des ressources humaines de l'Organisation. Le Directeur général Maiani s'est félicité de l'approbation du Plan par le Conseil en soulignant que le dévouement montré par l'ensemble du Laboratoire en 2002 s'était traduit par "un programme bien ciblé et un Laboratoire déterminé". "Cette approbation", a-t-il ajouté, "montre que le CERN est à nouveau sur la bonne voie."
Le LHC est maintenant au centre des activités du CERN : les éléments de l'accélérateur arrivent au Laboratoire en provenance du monde entier. Les détecteurs qui équiperont la nouvelle machine sont en bonne voie pour être achevés en 2007, et une première version limitée de la grille de calcul mondiale pour le LHC entrera en service en juillet 2003 en prévision des gigantesques volumes de données qui afflueront des futures expériences. Le professeur Maiani a déclaré : "Le CERN est fermement axé sur le calendrier actuel".
Les grands résultats scientifiques de 2002
Passant en revue les résultats scientifiques de l'année, le professeur Maiani a décrit un programme brillant, malgré les réductions de temps de faisceau. Le grand événement scientifique de l'année a été l'observation d'un grand nombre d'atomes d'antihydrogène par les expériences ATHENA et ATRAP. De nouvelles installations à basse énergie (REX-ISOLDE et nTOF) sont mises en service, et dans les hautes énergies trois expériences (COMPASS, NA48 et NA60) ont recueilli des données de bonne qualité en 2002. Le projet Neutrinos du CERN vers le Gran Sasso (CNGS) maintient son objectif d'un premier faisceau en mai 2006. Concernant la R&D sur les accélérateurs, le professeur Maiani a souligné que dans le cadre du projet CLIC on avait pu obtenir les gradients accélérateurs élevés (150 MV/m) qui seront nécessaires aux futures machines exploitées aux frontières des hautes énergies. Il a également informé le Conseil d'une nouvelle initiative lancée par le Comité européen sur les futurs accélérateurs : le Comité de coordination européen pour la R&D sur les accélérateurs (ESGARD). Ce comité a été créé pour coordonner cette activité à l'échelle du continent, il recherche un appui auprès du Sixième programme-cadre de l'Union européenne, et le CERN sera un partenaire actif.
L'Inde obtient le statut d'observateur
Le Conseil a accordé le statut d'observateur à l'Inde, partenaire dynamique du CERN depuis de nombreuses années. L'Inde a fourni des équipements et des équipes de techniciens pour le LEP, l'ensemble des injecteurs axé sur le PS et les expériences avec cibles fixes. Un accord de coopération signé en 1991 et reconduit pour dix ans en 2001 a officialisé ces contributions. La signature du protocole de 1996 avec le Département indien de l'énergie atomique a fait de l'Inde l'un des premiers Etats non-membres apportant d'importantes contributions au LHC. Les scientifiques indiens sont également des membres très appréciés des collaborations ALICE et CMS, et leurs compétences informatiques sont mises à profit pour les projets de grilles de calcul dans le cadre de nouveaux protocoles signés cette année.
Nouveau statut d'associé pour les Etats non européens
Reconnaissant le caractère de plus en plus mondial de la physique des particules et du CERN en particulier, le Conseil a convenu de créer un statut d'associé pour les Etats non européens qui souhaitent apporter des contributions appréciables aux activités du CERN. Les utilisateurs scientifiques du CERN représentent déjà la moitié des expérimentateurs en physique des particules du monde et près d'un tiers sont originaires d'Etats non-membres du CERN. Un statut d'associé offrirait un partenariat plus étroit que celui qui existe actuellement. L'Etat associé contribuerait au financement du CERN en versant une contribution annuelle, dont le niveau serait toutefois moins important que celle d'un Etat membre du fait de droits moins étendus. L'Etat associé aurait entre autres le droit de participer aux activités du CERN et d'assister au Conseil. Ses nationaux pourraient postuler pour des emplois au CERN et ses entreprises soumissionner pour des contrats du CERN.
Nominations de personnel supérieur
M. Werner Zapf (DE) a été nommé chef par intérim de la Division des ressources humaines du 1er mai 2003 au 31 décembre 2003.
Elections
M. J. Feltesse (FR) a été réélu Président du Comité des directives scientifiques un an à compter du 1er janvier 2003.
Les professeurs P. Carlson (SE), K. Rybicki (PL) et J. Stachel (DE) ont été reconduits dans leurs fonctions de membres du Comité des directives scientifiques pour trois ans à compter du 1er janvier 2003.
Le professeur M. Bourquin (CH) a été réélu Président du Conseil pour un an à compter du 1er janvier 2003.
Le professeur R. Sosnowski (PL) a été réélu Vice-Président du Conseil pour un an à compter du 1er janvier 2003.
Mme B. Sode-Mogensen (DK) a été réélue Présidente du Comité des finances pour un an à compter du 1er janvier 2003.
Mme J. Seed (GB) a été réélue Vice-Présidente du Comité des finances pour un an à compter du 1er janvier 2003.
Curriculum Vitae du Dr. Robert AYMAR
Né en 1936, Robert Aymar, de nationalité française, a étudié à l'Ecole Polytechnique avant d'entrer au Corps des Poudres (ancienne agence gouvernementale française spécialisée en recherche fondamentale et appliquée).
Après son affectation au CEA (Commissariat français à l'Energie Atomique) en 1959, sa carrière s'est orientée vers la recherche fondamentale en physique des plasmas et ses applications dans la fusion thermonucléaire contrôlée.
En 1977, Robert Aymar a été nommé Chef du projet Tore Supra, un tokamak supraconducteur devant être construit à Cadarache, dans le sud de la France. Il dirigea le projet de sa conception jusqu'à sa construction et sa mise en service en 1988, lorsque les premiers plasmas furent produits. Les objectifs de Tore Supra sont à la fois technologiques – utilisation de bobines supraconductrices refroidies à 1,8 Kelvins par de l'hélium superfluide – et scientifiques – confinement de plasmas chauds et denses pour produire des décharges de longue durée.
En 1990, Robert Aymar fut nommé Directeur à la Direction des Sciences de la Matière du CEA. A ce poste, il prit la tête d'un large éventail de programmes de recherches, théoriques et expérimentaux, incluant l'astrophysique, la physique nucléaire, des hautes énergies et des particules, la physique et la chimie de la matière condensée, la paléoclimatologie, mais aussi la fusion thermonucléaire par confinement magnétique.
En tant que Directeur du CEA, Robert Aymar siégea dans de nombreux conseils et comités au niveau national et au niveau international comme délégué français. Néanmoins, il a continué à jouer un rôle personnel dans le programme de fusion, comme Président du Comité de pilotage de la technologie de fusion et comme membre du Conseil scientifique de JET et du Comité consultatif technique de ITER. En décembre 2001, il a été nommé Président du Comité d'examen externe du LHC mandaté pour évaluer le projet LHC. Il a présenté les résultats au Comité des directives scientifiques du CERN et au Comité du conseil en juin 2002.
Robert Aymar a été nommé Directeur de la collaboration internationale sur la fusion ITER par le Conseil de ITER en juillet 1994 et Chef d'équipe internationale en juillet 2001. ITER (Réacteur thermonucléaire expérimental international) est une collaboration internationale dont l'objectif est de démontrer la faisabilité scientifique et technique de la fusion nucléaire à des fins pacifiques.
1. Le CERN, l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire, est basé à Genève. Actuellement ses états membres sont l'Autriche, la Belgique, la Bulgarie, la République Tchèque, le Danemark, la Finlande, la France, l'Allemagne, la Grèce, la Hongrie, l'Italie, les Pays Bas, la Norvège, la Pologne, le Portugal, la République de Slovaquie, l'Espagne, la Suède, la Suisse et le Royaume Uni. Inde, Israël, le Japon, la Fédération de Russie, les Etats Unis d'Amérique, la Turquie, la Commission Européenne et l'UNESCO ont un statut d'observateur.